Juin 2015

Indications géographiques non viticoles : du nouveau

La loi Hamon du 17 mars 2014 a introduit dans le Code de la Propriété Intellectuelle une procédure permettant aux produits manufacturés français d’obtenir une protection sur le territoire national et de valoriser les productions industrielles et artisanales locales par l’obtention de nouvelles indications géographiques, comme cela existait déjà pour les produits alimentaires.

L’article L.721-2 du Code de la Propriété Intellectuelle définit la nouvelle indication géographique comme étant « la dénomination d’une zone géographique ou d’un lieu déterminé servant à désigner un produit, autre qu’agricole, forestier, alimentaire ou de la mer, qui en est originaire et qui possède une qualité déterminée, une réputation ou d’autres caractéristiques qui peuvent être attribuées essentiellement à cette origine géographique ». C’est l’INPI qui gère ces appellations, une demande d’homologation du cahier des charges devant y être déposée.

Cette mesure ainsi que la possibilité pour les collectivités territoriales de s’opposer à des dépôts de marques postérieurs étaient en attente de décrets d’application et un premier décret a été promulgué le 3 juin 2015 : il s’agit du décret n° 2015-595 du 2 juin 2015, qui fixe les modalités de dépôt et d’examen par l’INPI des demandes d’homologation des indications géographiques protégeant les produits industriels et artisanaux (IGPIA) et ouvre à leurs organismes de défense la possibilité de former opposition à des demandes de marques.
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Il est donc désormais possible de déposer des demandes d’homologation d’IGPIA à l’INPI et de baser une opposition en France sur (i) une indication géographique – ce qui inclut également les autres AOC, AOP et IGP existant déjà dans notre droit – et (ii) sur le nom, l’image ou la renommée d’une collectivité territoriale.

En conséquence, l’INAO (en ce qui concerne les AOC, AOP et IGP « classiques ») et les organismes de défense des nouvelles indications géographiques de la loi Hamon (IGPIA) peuvent former opposition à l’INPI à l’encontre d’une demande de marque postérieure. Un nouveau formulaire d’opposition a vu le jour pour intégrer ces nouveaux fondements.

Le décret du 2 juin 2015 confirme également la possibilité d’opposition à une demande d’enregistrement de marque par une collectivité territoriale, qui peut invoquer son nom, ce qui a priori ne devrait pas susciter de problématique particulière, mais également son image ou sa renommée, ce qui sera certainement plus délicat à appréhender.

Il s’agit d’un développement considérable, même s’il faut attendre un certain temps pour voir comment en pratique le dépôt et la gestion de telles oppositions vont se dérouler et, surtout, quelles décisions seront rendues.

Un second décret n° 2015-671 du 15 juin 2015 est venu préciser les modalités d’alerte, par l’INPI, des collectivités territoriales sur les dépôts de marques en vue d’éventuelles oppositions.

Loi Evin : un assouplissement surprise 

Nous avons vu dans les précédents numéros de Vini Ma®k qu’un assouplissement de la loi Evin, il est vrai parfois invoquée et appliquée avec une sévérité excessive et non justifiée, était demandé par de nombreux professionnels et parlementaires.

L’un des principaux points de discussion concerne une distinction à établir entre la publicité pour les boissons alcooliques et l’information, pour éviter une trop grande censure dans de simples informations sur des boissons alcooliques ou de menacer l’essor de l’oenotourisme.

Après de premières tentatives parlementaires ayant échoué, les députés français ont adopté le 10 juin dernier, par surprise et contre l’avis du gouvernement, un amendement à la loi dite Macron visant à faire cette fameuse distinction entre information et publicité. Selon les auteurs de cet amendement, il ne s’agit pas de remettre en cause l’esprit ni la lettre de la loi Evin, mais de pérenniser « la tradition viticole ancestrale » française et tenir compte de ce secteur économique à succès.

La fameuse « publicité indirecte » en faveur de l’alcool, de l’article L 3323-3 du Code de la Santé Publique, est au centre de l’amendement adopté par les députés, qui limitent son champ d’application pour éviter de nombreux procès, faits notamment à des médias, ou les conséquences excessives d’une interprétation trop large de la notion de « publicité indirecte ».

La question a pris une tournure politique très marquée, sur fond de désaccord affiché du gouvernement dans un premier temps, puis de « clarification » de la modification par ce même gouvernement, entérinant donc l’assouplissement de la loi Evin permettant davantage d’actions de communication au grand dam du lobby hygiéniste.

Le gouvernement a donc maintenu le principe d’un assouplissement, renommé « clarification » et a décidé de recourir au fameux article 49-3 de la Constitution pour la loi Macron dans son ensemble. Le projet de loi a donc été adopté et repart une dernière fois au Sénat, avant une adoption souhaitée avant la mi-juillet.

Noms de domaine en <.wine> et <.vin> : du nouveau

Les précédents numéros de Vini Ma®k se faisaient également l’écho du « feuilleton » et des résistances rencontrées par les noms de domaine en <.wine> et <.vin>.

Il semblerait qu’une évolution se soit récemment produite puisque les extensions, qui auparavant étaient en statut « on hold », sont désormais répertoriées, sur le site de l’ICANN, comme étant « in contracting ».

DONUTS, qui avait déjà remporté aux enchères la gestion de ces extensions, serait donc sur le point de signer les contrats avec l’ICANN concernant ces extensions.

Selon le site www.domainincite.com, ce déblocage proviendrait d’un abandon des revendications de la part notamment de l’Union Européenne et des producteurs de vins, à moins que la raison principale soit que DONUTS ait enfin accepté les fameux mécanismes de protection qui étaient réclamés et à l’étude pour assurer une protection des appellations et indications géographiques.

A suivre !

Jurisprudence

Pour terminer, citons une intéressante décision de l’INPI rendue sur opposition, le 22 mai dernier : la société POMMERY, titulaire de la marque française BRUT ROYAL, a formé opposition à l’encontre de l’enregistrement d’une demande de marque LE ROYAL CHAMPAGNE et a obtenu gain de cause.flute_2

L’INPI considère en effet que le terme ROYAL, commun aux deux signes, est l’élément distinctif des deux marques et ne serait ni usuel ni banal. Il ne formerait en particulier pas un « tout indivisible » avec le terme BRUT ; de même, le public n’y verrait pas une référence à l’hôtel du même nom mais plutôt une « référence directe aux produits » désignés et dès lors, la demande de marque LE ROYAL CHAMPAGNE crée un risque de confusion et doit être rejetée.

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